Aller au contenu

JOUR 46

J’admets, j’enfreins les règles, c’est mal, il ne faut pas le faire.
Ce matin j’ai pris mon sac à dos, mes cliques et mes claques, mon attestation de sortie et j’ai traversé tout Paris en bus pour retrouver Baptiste.
Aucun de nous n’est malade, il est confiné tout seul, alors confinés ici ou confinée là-bas ça se recoupe et c’est plus sympa.

Pour traverser tout Paris j’ai pris le bus, il y a une ligne direct de chez moi à ici.
Le confinement à Paris n’est plus ce qu’il a été. Dans le bus on tente de respecter les distances de sécurité mais il y a déjà une personne tous les deux sièges, il y a beaucoup de monde. A la radio ils parlaient de l’impossibilité de respecter les distances de sécurité dans le métro quand le confinement se terminera. C’est sûr que si les bus atteignent déjà leurs capacités maximales alors qu’ils sont à moitié vides et que le confinement n’est pas fini, ça paraît assez improbable que les gens attendent sagement à 1 mètre les uns des autres qu’un métro moins rempli se présente à Châtelet aux heures de pointe, quand en temps normal on est tous écrasés les uns contre les autres. J’ai hâte de voir.

Dans le bus tout le monde a un masque. Je me demande bien où tous ces gens se sont fournis, il va falloir que je m’en préoccupe aussi. Un monsieur est venu me demander son chemin et j’ai trouvé ça très déroutant de devoir lire dans ses yeux ce que je ne comprenais pas, ne voyant pas ses lèvres.
C’est tellement étrange de ne plus voir le visage des gens. Et en même temps, à la fin du trajet j’avais déjà adapté ma façon de regarder les passagers, pour les distinguer par d’autres moyens que leurs expressions de visage, trouver leur individualité dans autre chose.
On aura tous des masques différents. On aura tous une façon légèrement différente de les porter, de les accrocher. On apprendra à se regarder dans les yeux, on apprendra le langage corporel pour comprendre que c’est à nous qu’on s’adresse dans la rue, on apprendra à parler avec un masque à une personne qui a un masque.
Après tout on le fait déjà avec les lunettes de soleil et ne pas voir les yeux de son interlocuteur c’est certainement tout aussi perturbant que de ne pas voir sa bouche.
Ça va être sympa cet été le combo masque + lunettes de soleil.

En tout cas je suis bien arrivée, pas de contrôle, pas de police, pas de voisin qui me tousse à la tête, et le sud de Paris ne ressemble pas du tout au 18e.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *