J’aime bien écrire alors je me suis dit que finalement j’allais continuer.
Et puis fin de confinement, déconfinement, retour à la normale, blablabla QUE DALLE le monde extérieur est toujours mystérieux et plein de dangers, on est encore tous perdus ou toujours coincés à droite à gauche là où on était confinés et ça sonnait comme la fin d’un truc mais on en a toujours le goût bien en bouche.
Aujourd’hui nous sommes samedi 16 mai. Depuis lundi 11, j’ai le droit de parcourir tout Paris. Je peux même aller plus loin que Paris, mais moi je voudrais aller plus loin que plus loin alors je vais me contenter de Paris pour l’instant.
Enfin Paris… le 11 mai j’étais déjà au Bois de Vincennes pour revoir du vert et de la nature et je dois même vous avouer que j’y étais le 10 aussi.
Le 10 c’était encore le confinement et on n’avait officiellement pas le droit de sortir de chez soi sans autorisation (rappelez-vous, cette bonne vieille époque où il nous fallait une dérogation de nous-mêmes pour sortir ! Haha !), mais je suis tout de même allée visiter le Bois de Vincennes, après avoir enjambé le ruban en plastique tendu à l’entrée (enfin plutôt coupé, pendant de chaque côté de l’entrée, et en cours de décomposition), je me suis promenée au milieu des arbres, des oiseaux, des canards, et des chiens tenus en laisse par tous leurs maîtres. Au milieu de plein d’humains donc. Ça m’a fait un bien fou de revoir une forêt ! Et sa douce humidité fraîche.
Le 11 c’était pire, il y avait vraiment beaucoup de monde. Et je ne suis pas certaine qu’officiellement le Bois de Vincennes fasse partie des forêts qui sont à nouveau accessibles. C’est probablement considéré comme un parc, et donc interdit. Mais punaise, dans une forêt, même bondée, il y a suffisamment de place pour qu’on puisse éternuer à une distance respectable les uns des autres ! Pourquoi ne peut-on pas y retourner ? Mais dans les bus oui ? Oui, parce que les forêts ne rapportent rien au système capitaliste, d’accord, ce n’est pas marrant.
La promenade du 11 dans le Bois de Vincennes a été suivie de promenades dans Paris. Le 12 la promenade était sur les quais de la Seine, là où nous n’avons maintenant plus le droit d’aller boire de l’alcool parce que c’est trop tentant, qu’on est nombreux à le faire et à se tousser dessus de trop près, et que ça ne rapporte toujours pas suffisamment d’argent au système capitaliste, contrairement aux transports, on a compris.
Peut-être aussi qu’ils nous interdisent de boire parce que c’est une activité incompatible avec les masques ? Mais dans ce cas ils devraient interdire les cigarettes et les sandwichs aussi.
Toujours est-il qu’on a le droit de se promener, et c’était rigolo à faire. Regarder les gens à nouveau, les écouter parler, rire, raconter n’importe quoi, recommencer à commenter les tenues et les cheveux de nos compatriotes. Ca faisait trop longtemps.
Contraste saisissant ensuite entre la cour du Louvre accessible, le jardin des Tuileries entièrement fermé et vide, et en arrière plan les Champs Elysées à nouveau empruntés par tous les automobilistes de la capitale. Promenade particulièrement agréable à faire avec quelqu’un qui répète toutes les 5 minutes « et ben il est beau le changement de paradigme ». Mais c’est vrai qu’on avait oublié l’odeur, le bruit et la fumée des pots d’échappement. Et en effet, à vélo le changement de paradigme aurait été le bienvenu. J’étais bien, seule sur mes routes. N’ont-ils pas tous dit qu’ils avaient compris les limites du système et ne voulaient plus jamais utiliser leur voiture ? Retourner cultiver leur jardin potager à la campagne et arrêter de consommer à tout va ?
Peut-être que c’est ce qu’ils s’étaient dit, et puis on leur a répondu que les transports en commun n’allaient pas tous reprendre et que s’ils les prenaient sans masque à des horaires où ils n’y étaient pas autorisés ils auraient une amende. Et que dans tous les cas le virus était encore partout et que les gouttelettes restaient en suspension dans l’air et qu’on pouvait l’attraper rien qu’en croisant des gens à 2 mètres de distance. Alors ils ont ressorti leur voiture.
Mais bon, fini le Paris sans voiture. Elles sont partout et elles sont beaucoup.
Le 13 la balade était dans le 17e, à la recherche désespérée d’un masque, dans des boutiques déjà dévalisées. Où si par chance il reste un masque, on n’est pas autorisé à l’essayer et on étouffe à coup sûr dessous. A chaque nouveau magasin, le distributeur de gel hydroalcoolique nous fait de l’œil, ou surtout le gérant de la boutique ou le vigile, alors on se sent obligé de se tartiner encore et encore de gel, et au bout de 30 minutes de porte à porte à la recherche sans fin de masque, mes mains ressemblaient à des pattes de crocodile écailleuses et grises. Mais revoir l’intérieur de boutiques qui vendent des choses qui ne se mangent pas c’était un délice !
En revanche les mauvais souvenirs du confinement sont toujours là : déjà, la queue devant chaque magasin. Toujours là, voire pire, étant donné que davantage de magasins sont ouverts. Tout à l’heure j’ai voulu aller à Leroy Merlin pour acheter des guirlandes lumineuses pour notre petit balcon. Puisqu’on est condamnés à faire nos soirées à la maison, autant qu’elles soient agréables et stylées. La queue devant le magasin faisait plus de 50 mètres. Jamais je n’aurais pensé qu’un magasin tel que Leroy Merlin, à Rosa Parks, aux confins de Paris, pouvait avoir autant de succès. J’ai fait demi-tour, pas le temps, tant pis pour nos soirées.
Le télétravail n’a pas disparu, au contraire, on le continue tous de façon assez sérieuse. Je vais retourner au bureau 2 jours par semaine à partir de la semaine prochaine, mais seulement parce que je l’ai demandé et qu’on a trouvé une façon de me véhiculer sans prendre les transports en commun. Jojo retourne au bureau 2 ou 3 jours par semaine. Charlotte est toujours là, et Marine est revenue. Elle a repris un travail, fini le chômage, et elle est en télétravail. Donc nous voilà maintenant 4, installés sérieusement sur la table, à devoir reprendre nos bonnes vieilles règles, voire à devoir les réadapter étant donné qu’on est plus nombreux et qu’on repart sur un nouveau cycle de travail, sans date de fin, mais plus sérieux qu’à la fin du confinement. En tout cas pour ma part on commence de nouveaux projets, on a des choses à préparer, et c’est la fin de la glandouille.
Le confinement est terminé mais beaucoup de mes personnes préférées sont toujours coincées là où elles étaient confinées, parce que le télétravail continue et qu’elles sont toujours mieux loin de Paris qu’ici. Donc c’est fini mais c’est pas fini. La fausse joie.
Et puis on peut sortir mais on ne peut pas sortir : les bars sont fermés, les restaurants et les boîtes aussi. Les cinémas, les théâtres, les salles de concert. On peut sortir mais il n’y a rien à faire d’autorisé dehors. On peut toujours braver les interdits et aller boire de l’alcool sur la voie publique, et c’est d’ailleurs sûrement ce qu’on va faire puisqu’on habite quasiment tous dans des 20 m2, mais c’est beaucoup moins sympa qu’une terrasse.
Le confinement est terminé mais les services n’ont pas repris à la Louve, c’est toujours la queue et la jungle et la psychose du microbe quand je vais y faire mes courses.
Le confinement est terminé mais il faut qu’on continue à se méfier, à faire attention, voire faire encore plus attention vu qu’on ressort tous. Il faut qu’on se lave mieux les mains, qu’on ait des masques, qu’on en ait plusieurs pour pouvoir les laver entre chaque sortie, il faut qu’on continue à se tenir loin des gens, on n’a pas le droit de se toucher ou de se faire des bisous pour se dire bonjour.
Et on n’a pas de date de fin pour ce déconfinement.
La libération n’avait rien d’enthousiasmant. Elle n’est pas passée, elle sera lente et diffuse.
Alors ces rapports de retour à la normale risquent malheureusement de durer. Il y en aura moins souvent, mais probablement longtemps.
Bon courage, doux lecteurs !